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Maria 

 

 

 

 

La première fois que je vis Maria, la compagne de Paul, mon frère, je me dis qu’ils ne feraient pas long feu ensemble. Je les trouvais mal assortis. Autant mon frère était naturel et joyeux, autant Maria était hautaine et guindée. Elle me saluait du bout des lèvres en détournant aussitôt son regard comme si j’étais une quantité négligeable. A table, elle se tenait droite comme un I et picorait de petites bouchées d’un air pincé ; j’étais partagée entre l’envie de m’en moquer ou de la gifler. Il me démangeait aussi de lui faire remarquer qu’elle faisait ses besoins comme tout le monde et que son attitude n’y changerait rien. Je prenais de moins en moins de plaisir à me rendre aux diverses fêtes de famille car j’imaginais à l’avance l’attitude rébarbative de Maria. Son arrivée projetait un froid sur l’assemblée et tout le monde semblait soudain moins naturel et gai. Cela dura au moins un an avant que j’ouvre les yeux sur elle.

Je m’en rappellerai toujours, c’était un samedi du mois de février, j’avais décidé de rendre une petite visite impromptue et intéressée à mon frère, car je venais d’installer un ordinateur à la maison et j’avais besoin de ses conseils pour utiliser quelques programmes ainsi qu’Internet. Je sonnai et j’allais presque repartir quand j’entendis un bruissement derrière la porte. Celle-ci s’entrebâilla à peine et j’aperçus Maria en train de s’essuyer vivement la figure. Des larmes s’échappaient malgré tout du coin de ses yeux avant qu’elle n’ait le temps de les éponger avec son mouchoir. En me voyant elle pleura carrément sans plus essayer de se retenir. Ne sachant que faire je la pris dans mes bras et lui frottai le dos en signe de consolation.

-       Que se passe-t-il ? Soudain très inquiète en pensant à mon frère.

-       Ma mère vient de me raccrocher au nez après m’avoir dit des horreurs. Je la déteste !

Ouf ! Je me sentis égoïstement soulagée, car je m’attendais à quelque chose de très grave mettant en cause Paul.

-       Allez, viens t’asseoir et raconte-moi tout cela, si bien sûr tu en as envie.

-       Je veux bien, cela me fera sûrement du bien de t’en parler.

Et là, à ma grande surprise, je découvris une tout autre Maria que celle que je croyais connaître. Elle me raconta :

-       Pour que tu comprennes les choses, quand j’étais enfant ma mère ne s’occupait pas de moi. Elle préférait sortir avec des types différents chaque semaine. D’ailleurs cela n’a pas changé depuis, bref, ce n’est pas le problème. Je devais m’occuper de tout à la maison, elle ne m’aidait jamais pour l’école ou le reste, je faisais les courses, le ménage, je me suis élevée toute seule sans compter les problèmes que j’ai dû affronter contre ses types qui disjonctaient parfois en ma présence. A présent elle joue les mères parfaites devant Paul. Et ça marche ! Elle a même réussi à lui monter la tête contre moi pour se venger car pour la première fois j’ai refusé de lui donner de l’argent. Oui, tu comprends, j’entretiens ma mère depuis toujours mais là je n’en peux plus. J’en ai marre. J’ai ma vie. Elle ne veut pas comprendre. On s’est disputé avec Paul car il croit qu’elle a des soucis financiers et que je suis radin, c’est ce qu’elle lui a dit ! Ce n’est absolument pas vrai, elle ne se refuse rien et vit très bien avec mon argent ! Il est parti, fâché contre moi. Il ne sait pas tout cela, je ne lui ai rien raconté, de plus il aime bien ma mère alors il croit que c’est moi le bourreau. Je ne sais même pas où il est.

    

Elle me regardait d’un air désespéré. J’étais abasourdie par ce que je venais d’entendre. En quelques secondes toute l’enveloppe négative qui entourait Maria s’était envolée et je me mis, non plus à la haïr comme il y avait encore peu de temps auparavant, mais à vouloir voler à son secours. C’était injuste ce qui lui arrivait. J’avais envie de secouer Paul pour qu’il revienne lui faire des excuses et écouter à son tour son enfance, afin qu’il aperçoive le vrai visage de la mère de Maria. En fait, je découvris une jeune femme meurtrie par beaucoup de souffrances, de frustrations, de sentiment d’abandon, bref, quelqu’un de sensible se cachant derrière un masque de froideur pour ne rien laisser paraître de cette fragilité sous-jacente.

Elle finit par se calmer et on se retrouva à se raconter nos vies devant des gâteaux et du thé. Lorsque Paul rentra le soir, il nous surprit à éclater de rire dans le salon en se tapant sur les cuisses tout en essuyant des larmes d’euphorie et de complicité. Toute la tension des heures précédentes était retombée.

Il fut très surpris et me regardait d’un air interrogateur. Mon animosité à l’égard de Maria ne lui avait pas échappé et je pouvais sans peine imaginer ses questions.

Je les laissai seuls pour régler leurs problèmes.

 

Cette histoire me servit de leçon car lorsque je regarde quelqu’un à présent, j’essaie toujours de deviner quelle est la face cachée de sa personnalité avant d’oser me forger une opinion.

 

 

 

 

                                                                                                                                          Christie Jane (Juin 2005)

 

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